Conduire le changement, c’est d’abord se changer soi-même
Conduire le changement, c’est d’abord se changer soi-même
Pourquoi, même lorsque le changement semble n’avoir que des aspects positifs, les personnes conservent-elles leurs comportements d’avant? En général les dirigeants savent définir les comportements attendus lors des transformations de l’organisation, et cela concerne les autres : “il faut qu’ils changent”
Pressé par le temps, Martin n’a pas identifié les schémas mentaux (mindsets) qui sous-tendent ces comportements et qui expliquent que “ des collaborateurs intelligents et de bonne volonté continuent à faire comme d’habitude alors que leur environnement a changé?” Et pour cause, Martin fait lui-même partie du “problème” puisqu’il se trouve “à l’intérieur” du système. Il n’a pas assez de recul pour le voir fonctionner et réaliser en quoi il contribue (inconsciemment) au maintien de ces comportements dont il ne veut plus.
Le coaching d’organisation permet la prise de hauteur essentielle pour mettre en lumière les paradoxes du comportement humain. Son intention est de faire évoluer en douceur ces “idées bloquantes” des dirigeants et des collaborateurs pour les accompagner dans cette transformation irréversible, comme celle de la chenille en papillon.
Il est crucial de faire émerger ces “idées bloquantes” pour, tout d’abord, les honorer. En effet, par le passé elles ont été pertinentes et ont permis aux personnes de réussir. On ne construit pas sur une page blanche mais en s’appuyant sur les ressources, les valeurs et les réussites du passé.
Voici quelques valeurs fortes collectées chez les n-1 de Martin, et qui ont par la suite empêché les transformations récentes :
“mon job, c’est de donner aux clients ce qu’ils veulent”. Généreuse idée, mais elle implique aussi que les commerciaux ne questionnent pas les besoins du client, quitte à se contorsionner pour le satisfaire. Pourtant, il arrive fréquemment que le client se plaigne car son besoin n’a pas été suffisamment exploré. Au fond il ne savait pas encore ce qu’il voulait et il attend des commerciaux qu’ils l’aident à le trouver.
“La critique endommage les relations”. La bienveillance est une valeur importante dans son entreprise. Alors Martin et ses managers n’osent pas se parler sincèrement. Ils ne donnent pas non plus de feedbacks qui permettraient collaborateurs d’apprendre et de se développer, même au moment des entretiens annuels qu’ils expédient au plus vite. Dommage, car cela génère beaucoup de non-dits et de frustration.
“ L’information c’est le pouvoir, et les bons leaders sont des leaders puissants”. Conséquence : la rétention d’information est la règle dans cette entreprise, ce qui génère un manque de visibilité, un fonctionnement en silos et de la méfiance à l’égard des n+1.
Pour recadrer ces idées fondées sur des valeurs bien ancrées, et augmenter le panel des choix possibles, le coach fait explorer aux collaborateurs la possibilité d’autres croyances comme :
“Aider le client à vraiment comprendre son besoin”. Cette idée-là permet d’imaginer de nouveaux comportements et savoir-faire : l’écoute, l’observation et la reformulation. Cela signifie aussi passer d’une posture de subordination à une véritable relation de parité avec le client. Ce qui est très valorisant pour le commercial.
Dans le management de la performance, plutôt que la bienveillance à tout prix, n’est-il pas intéressant de considérer que “la sincérité dans le respect est essentielle pour construire des relations de confiance” ? Martin et son comité de direction réalisent qu’un feedback engageant n’endommage pas les relations, il les améliore. C’est une façon de considérer son interlocuteur non comme une victime qu’il faudrait protéger, mais comme un égal qui mérite l’honnêteté, lorsqu’on lui donne un feedback.
Le partage d’information accroît l’influence d’un manager et donc son leadership. En expérimentant ensemble cette façon de travailler, les membres du comité de direction décident de se diriger ensemble vers un mode de management moins compétitif et plus collaboratif qui va bénéficier à toute l’organisation.
Martin et ses directeurs ont compris que le changement de comportement qu’ils attendent des autres n’est crédible que s’ils l’incarnent eux-mêmes au quotidien, ce qui suppose qu’ils soient passés eux-mêmes par ces phases de transformation en prenant du recul sur leurs croyances et en cessant de rejeter la faute sur les collaborateurs.
Quand on demande aux dirigeants s’ils donnent l’exemple des changements qu’ils attendent dans l’entreprise, ils répondent oui à 86 %. Mais lorsque l’on pose la question aux n-1, le pourcentage tombe à 53%. Changer une organisation, cela commence par accepter de se changer soi-même.